Posted in Editorial Pharos 04

Editorial (Pharos 4)

Editorial (Pharos 4) Posted on 1 octobre 1998

Dans une lettre récente adressée à la First Lady américaine dans laquelle elle lui exprimait son soutien à propos de l’affaire Lewinsky, l’ancienne épouse d’Andreas Papandreou citait à l’appui de sa démonstration un tragique grec qui dénonçait, à l’époque déjà, la tendance des hommes politiques à se croire plus près des dieux que du reste des mortels.

Au-delà de son caractère anecdotique, cette lettre m’a amené à m’interroger sur les raisons de l’actualité de sa citation. Certes, on retrouve chez l’être humain des vices et des vertus, qualités constitutives de sa personne, qui ne varient guère selon le temps ou le lieu, comme nous le montre l’ethnologie. Mais si rien n’a changé, pourquoi s’ingénier à ressortir des placards ces anciens Grecs en particulier, plutôt que de privilégier des contemporains ? Ici intervient peut-être ce que j’appellerais la manière. Autrement dit, ce n’est pas le contenu seul qui nous touche, mais aussi la forme.

Un petit exemple: lorsqu’Apollinaire publie ses Calligrammes, poèmes-dessins, on crie à la révolution poétique. Mais n’était-ce pas la même idée qu’avait eue, vingt-deux siècles plus tôt, ce poète hellénistique qui, consacrant quelques vers à Pan, les avait agencés de manière à suggérer la forme d’une flûte, instrument du dieu ? Etonnante modernité, illustration de cette créativité grecque qui par sa vitalité exceptionnelle touche à l’éternel.