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Le jardin d’Alcinoos

Le jardin d’Alcinoos Posted on 1 novembre 1997

Êtes-vous parmi les heureux Lausannois ou vacanciers qui, pendant l’été, sont venus se promener dans Jardins 97 ? Alors les parcs de la ville n’ont plus aucun secret pour vous, ni les balcons verdoyants, les buissons poétiques, les terrasses mélancoliques, les potagers artistiques, les jardins taillés, en bataille, en treilles, en vrilles, en musique, vrais, faux, frais, clairs, à l’ombre, au soleil, verts, roses, blancs, rouges, jaunes, légers et souriants sur leur gravier bleu rêve.

Vous qui avez entendu tinter le Zéphyr à Montbenon, qui vous êtes désaltérés à la fontaine moussue du Grand-Saint-Jean, qui avez reposé vos fatigues dans les fauteuils en rotin de Rumine, qui, à la Rue Neuve, avez souri à la paysanne de la fontaine, qui vous disait « Je vis! »… vous pourrez rêver désormais aux terrasses de Babylone, aux pergolas de Pompei, ou au jardin d’Alcinoos…

Odyssée, VII, 112-132

Aux côtés de la cour, on voit un grand jardin, avec ses quatre arpents enclos dans une enceinte. C’est d’abord un verger dont les hautes ramures, poiriers et grenadiers, pommiers aux fruits d’or, puissants oliviers et figuiers domestiques, portent leurs fruits sans se lasser ni s’arrêter; l’hiver comme l’été, toute l’année, ils donnent; l’haleine du Zéphyr, qui souffle sans relâche, fait bourgeonner les uns, et sur les autres elle fait croître la jeune poire auprès de la poire vieillie, la pomme sur la pomme, la grappe sur la grappe, la figue sur la figue. Plus loin, chargé de fruits, c’est un carré de vignes, dont la moitié, sans ombre, au soleil se rôtit, et déjà l’on vendange et l’on foule les grappes; mais, dans l’autre moitié, les grappes encore vertes laissent tomber leur fleur ou ne font que rougir. Enfin, les derniers ceps bordent les plates-bandes du plus soigné, du plus complet des potagers; vert en toute saison, il y coule deux sources: l’une est pour le jardin, qu’elle arrose en entier, et l’autre, sous le seuil de la cour, se détourne vers la haute maison, où s’en viennent à l’eau tous les gens de la ville. Tels étaient les présents magnifiques des dieux au roi Alcinoos.